«Il faudrait penser à toutes nos misères, il faudrait se souvenir que nous étions une région saignante, gémissante, atrocement rançonnée. Ce qu’il a fallu nous imposer d’énergie, de privations et de sacrifices est incalculable. »
Ainsi parlait en 1910, un habitant de Formiguères. Son propos exprimait la rancœur, celle de ne pas voir arriver en Capcir une ligne de chemin de fer. Longtemps tiraillée et chahutée, la région n’a jamais été épargnée par les soubresauts de l’histoire.
Ce plateau du pays catalan (le plus haut, entre 1500 et 1700 mètres d’altitude) tire très certainement son nom du vent le cirsius (cers) car il indique le cap cirsius ; tourné vers le nord (la tramontane réputée si glaciale en altitude). C’est en tout cas cette définition donnée par Etienne BADIE qui semble trouver le plus d’explications.
Jusqu’aux premiers textes citant nommément le Capcir, ce pays sauvage n’était autre que la haute vallée de l’Aude.
C’est un pays froid, même très froid !
Son climat si rigoureux suffit à justifier et à comprendre la vie si particulière de ses sédentaires.
Cette région naturelle grande d’environ 15 000 hectares, encadrée par le Carlit et le Madres, ouverte aux cols de la Quillane et des Ares, possèdent entre autre, des massifs particulièrement élevés et vertigineux. Les Péric qui culminent à 2820 mètres d’altitude, (deux montagnes jumelles baptisées petit et grand Péric), la Costa dal Pam sorte de dôme imposant, le roc de Péborny surplombant le lac de Balcère, le roc d’Aude à 2325 mètres et pour finir le mont Llaret à 2377 mètres.
Il y coule la rivière de l’Aude dont les principaux affluents, la Lladura et le Galba lézardent la plaine pour filer vers de vastes étendues de prairies et de forêts. Celles-ci, essentiellement de pins, élément capital de cet environnement procurent une immense couronne sombre. Un vieux proverbe du pays dit à ce propos : « Les gens du Capcir un de ces jours, trouveront des pins même dans leur marmite ! ». La forêt est et était une richesse considérable, sujette à bien de convoitises et de douloureux combats. Elle donnait le bois de chauffage sans excès et ce encore de nos jours. Aux racines, le bois de pin est très dur, gras et résineux. Il permettait d’assurer l’allumage du feu. Il constituait indirectement le seul moyen d’éclairage, malgré la fumée abondante et la forte odeur piquante que le pin dégageait. Cette odeur si caractéristique des maisons de montagne l’est encore aujourd’hui, colorée tantôt par les senteurs de pailles, et tantôt par les odeurs du bétail.
La forêt donnait également le bois de construction pour toutes les bâtisses, les ponts, les planchers, les cloisons, les fontaines et puis pour l’industrie, les meubles, les instruments, les charrettes, les « esclops » de mon origine les sabots.
Ses proches voisins, la Cerdagne et le Conflent, lui ont toujours reconnu d’être le pays froid par excellence. On a même déjà pu entendre dire de ce coin des Pyrénées Orientales être « la petite Sibérie d’Europe » !
En fait, il peut y faire froid à toutes les saisons, neige au programme même au mois d’août. Le vent violent et froid du nord-ouest y est redoutable. La tramontane et le Carcanet, vent du nord-est celui-là, typiquement capcinois, peut en quelques minutes recouvrir le pays d’un épais brouillard baptisé du même nom, dans lequel on se peut se perdre facilement.
Un guide historique rappelait même dans ces écrits : « …ce paysage est d’une douceur pâlotte, de peu de caractère, incapable de suggérer de vives images, comme cela se produit en Cerdagne, campagne monotone sous un ciel trop souvent voilé. En dehors des mois d’été, l’atmosphère est ordinairement brumeuse, ce qui explique fort bien cet air de mélancolie qui caractérise la plupart de ses habitants : ce sont des plantes qui n’ont pas assez vu la lumière » Quelle sévérité ! Mais c’était sans compter sur le vent d’Espagne, chaud et sec, où le soleil découvre le ciel, la grandeur et la beauté du pays, l’extraordinaire luminosité d’où se puise, ce sentiment d’espace et de paix. La terre rend alors au centuple ce qu’elle avait caché et, miracle, les mauvais moments sont aussitôt oubliés.
Toutefois, si ce qui caractérisait les capcinois, et donc les anglois, s’arrêtait seulement au climat, alors il n’y aurait pas tant d’histoires à raconter.
Ce qui singularise ce peuple, se sont surtout les luttes et les combats incessants de ces gens contre un pays difficile, une terre ingrate, dont les pouvoirs politiques furent ballottés d’Espagne, de France, en Rois de Majorque, comte de Foix et autres Administrations Occitanes, Catalane, française et j’en passe, en somme toujours étrangère à ce pays.
De siècle en siècle, les capcinois ont ainsi cultivé une indépendance farouche qui perdure encore aujourd’hui sous une autre forme.
Le Capcir atteignit le XXème avec dix communes, bien qu’il en subsiste six aujourd’hui : Les Angles, Fontrabiouse et Espousouilles, Formiguères et Villanova, Matemale, Puyvalador et Rieutort, enfin Odeillo et Réal.
Les Angles est de loin la commune la plus vaste du plateau du Capcir. Victime des sarcasmes de l’histoire, elle vécut longtemps recluse et isolée au creux du Llaret, montagne qui dominait le plateau Anglois. Dans ces longs mois d’hiver, durant de longues années les anglois écumèrent une vie essentiellement basée sur la culture agricole. Le maintien des hommes était garanti à l’époque grâce aux pasquiers et à l’élevage. La hiérarchie des ressources se bornait à ce triptyque élevage, forêt, agriculture. Le capcinois se nourrissait essentiellement des produits de la terre: pain de seigle (seule céréale qui résistait à l’altitude et au froid), les pois et les choux. Aux cultures classiques s’était ajoutée la pomme de terre définitivement adoptée. Les petites de préférence, très charnues. Car assez vite, on s’aperçut qu’elles venaient très bien avec l’altitude. Très vite aussi, la faim qui rodait sans cesse et malgré les craintes, on se dit que si elles étaient bonne pour les animaux, elles le seraient pour l’homme.
La pomme de terre - aliment de base de l’humanité – le « pain des pauvres » comme disait Louis XVI, apparue à la fin du XIXème siècle devenait de surcroît un moyen non négligeable de ressource (elle sera la plus réputée dans toutes les Pyrénées-Orientales et se vendra facilement dans toute la région).
Aujourd’hui encore, elle demeure la plus cultivée du coin. Certains enfants du village ayant compris le parti qu’il pouvait tirer de ce riche légume ont attelé à nouveau le tracteur pour la période estivale. Il n’est pas rare de trouver à chaque coin de maison l’été, des points de vente. C’est dire l’engouement pour la belle « perdiu » du Capcir !
On peut alors venir faire son choix dans ces vieilles granges désaffectées où règne une ambiance de fraîcheur mêlée à l’odeur de terre qui imprègne les pommes !
Le porc représente l’essentiel de la viande que le Capcinois consomme. Il s’octroie aussi une partie du gibier qu’il braconne et des truites qu’il pêche dans les rivières et les lacs.
Il écoule le reste dans les hôtels. Les veaux et les vaches sont vendus à la foire. L’argent récolté sert à se procurer un peu de vin, d’huile, de riz ou de sardine...
L’unité géographique évidente conféra au Capcir certaines particularités. Jusqu’au milieu du XXème siècle, il existait une unité ethnique bien spécifique, le capcinois, sujet têtu, petit, sec, souvent blond, les yeux gris, endurant, robuste, vaillant, obstiné, solide, dégourdi et suffisamment avisé pour inventer un trésor d’ingéniosité pour survivre. Même la langue y était différente. On y parlait un pseudo catalan. Par exemple, le couteau que l’on appelait en plaine, « el ganibet » se disait « el coutell » en Capcir.
Pour autant, jamais l’autonomie du Capcir ne suffisait à y créer une unité administrative réelle.
Après bien de soubresauts, l’Espagne dernier pays à détenir le Capcir, garda finalement la viguerie de Cerdagne, à l’exception de la vallée de Carol et d’une continuation de territoires qui serviraient de communication entre cette vallée et le Capcir.
Le 12 novembre 1660, par la convention de Llivia, 33 villages situés dans la dite vallée furent désignés pour assurer cette communication. Llivia, ville et non village aux yeux des Espagnols, ne fut pas cédée. C’est ainsi que naquit l’enclave espagnole.
La frontière coupa en deux le pays, mais le Capcir allait redevenir dès lors définitivement français.
Seule Formiguères demeurait de par son imposante stature, chef-lieu de territoire. Les allées et venues officielles s’opéraient à cette époque par le nord en provenance de l’Aude. Les lignes de transport joignaient naturellement Formiguères au reste du pays.
Le parcours des Angles n’eut rien d’un chemin de croix. Cloîtré dans son coin de rectangle, elle n’en acquit pas moins une force de caractère exemplaire et un sens aigu de l’indépendance. Elle dut d’abord attendre l’aube du XXème siècle pour être enfin reliée à Mont-Louis. Ce fut en 1894, il avait fallu près d’un siècle pour construire cette route ! Les bouleversements politiques du pays ayant énormément influencés la situation du Capcir, la construction de la nationale 118 se fit pressentir dès 1806. La route partit de Mont-Louis en 1825 pour s’achever de l’autre côté, dans le Donnezan, en 1885. Les Angles pourtant maintes fois demandeur, n’obtint pas la desserte de cette voie et dut attendre une décennie supplémentaire pour être enfin reliée via le col de la Quillana. Ce sera la seule voie de communication qui relie encore aujourd’hui les Angles au reste des P.O. Un grand projet de chemin de fer vite avorté, aurait pu sincèrement modifier le cours de l’histoire, mais il ne fut que grande désillusion. Les guerres n’y furent pas étrangères. Le projet tomba définitivement à l’eau en 1927. Rien ne se fit. Les Angles et le Capcir pouvaient alors se mourir tout doucement…
Mais il en fallait beaucoup plus pour faire tomber les Angles. Tant bien même les murs survivraient, encore fallait-il que ses habitants eux, survivent !
En 1836, les Angles comptait 730 habitants. Le maximum enregistré jusqu’alors. Tandis que ses voisins démarraient un certain exode interne, Réal avec Odello, Fontrabiosa avec Esposolla, Matemala également, opéraient des mouvements de population à destination de Formiguères, les Angles stabilisait sa population à une moyenne de 500 habitants après avoir perdu près de 150 habitants sur seulement 10 ans.
En 1936, la commune comptait 517 habitants, elle n’en comptait plus que 341 en 1946 : l’heure du déclin avait sonné…
Ainsi parlait en 1910, un habitant de Formiguères. Son propos exprimait la rancœur, celle de ne pas voir arriver en Capcir une ligne de chemin de fer. Longtemps tiraillée et chahutée, la région n’a jamais été épargnée par les soubresauts de l’histoire.
Ce plateau du pays catalan (le plus haut, entre 1500 et 1700 mètres d’altitude) tire très certainement son nom du vent le cirsius (cers) car il indique le cap cirsius ; tourné vers le nord (la tramontane réputée si glaciale en altitude). C’est en tout cas cette définition donnée par Etienne BADIE qui semble trouver le plus d’explications.
Jusqu’aux premiers textes citant nommément le Capcir, ce pays sauvage n’était autre que la haute vallée de l’Aude.
C’est un pays froid, même très froid !
Son climat si rigoureux suffit à justifier et à comprendre la vie si particulière de ses sédentaires.
Cette région naturelle grande d’environ 15 000 hectares, encadrée par le Carlit et le Madres, ouverte aux cols de la Quillane et des Ares, possèdent entre autre, des massifs particulièrement élevés et vertigineux. Les Péric qui culminent à 2820 mètres d’altitude, (deux montagnes jumelles baptisées petit et grand Péric), la Costa dal Pam sorte de dôme imposant, le roc de Péborny surplombant le lac de Balcère, le roc d’Aude à 2325 mètres et pour finir le mont Llaret à 2377 mètres.
Il y coule la rivière de l’Aude dont les principaux affluents, la Lladura et le Galba lézardent la plaine pour filer vers de vastes étendues de prairies et de forêts. Celles-ci, essentiellement de pins, élément capital de cet environnement procurent une immense couronne sombre. Un vieux proverbe du pays dit à ce propos : « Les gens du Capcir un de ces jours, trouveront des pins même dans leur marmite ! ». La forêt est et était une richesse considérable, sujette à bien de convoitises et de douloureux combats. Elle donnait le bois de chauffage sans excès et ce encore de nos jours. Aux racines, le bois de pin est très dur, gras et résineux. Il permettait d’assurer l’allumage du feu. Il constituait indirectement le seul moyen d’éclairage, malgré la fumée abondante et la forte odeur piquante que le pin dégageait. Cette odeur si caractéristique des maisons de montagne l’est encore aujourd’hui, colorée tantôt par les senteurs de pailles, et tantôt par les odeurs du bétail.
La forêt donnait également le bois de construction pour toutes les bâtisses, les ponts, les planchers, les cloisons, les fontaines et puis pour l’industrie, les meubles, les instruments, les charrettes, les « esclops » de mon origine les sabots.
Ses proches voisins, la Cerdagne et le Conflent, lui ont toujours reconnu d’être le pays froid par excellence. On a même déjà pu entendre dire de ce coin des Pyrénées Orientales être « la petite Sibérie d’Europe » !
En fait, il peut y faire froid à toutes les saisons, neige au programme même au mois d’août. Le vent violent et froid du nord-ouest y est redoutable. La tramontane et le Carcanet, vent du nord-est celui-là, typiquement capcinois, peut en quelques minutes recouvrir le pays d’un épais brouillard baptisé du même nom, dans lequel on se peut se perdre facilement.
Un guide historique rappelait même dans ces écrits : « …ce paysage est d’une douceur pâlotte, de peu de caractère, incapable de suggérer de vives images, comme cela se produit en Cerdagne, campagne monotone sous un ciel trop souvent voilé. En dehors des mois d’été, l’atmosphère est ordinairement brumeuse, ce qui explique fort bien cet air de mélancolie qui caractérise la plupart de ses habitants : ce sont des plantes qui n’ont pas assez vu la lumière » Quelle sévérité ! Mais c’était sans compter sur le vent d’Espagne, chaud et sec, où le soleil découvre le ciel, la grandeur et la beauté du pays, l’extraordinaire luminosité d’où se puise, ce sentiment d’espace et de paix. La terre rend alors au centuple ce qu’elle avait caché et, miracle, les mauvais moments sont aussitôt oubliés.
Toutefois, si ce qui caractérisait les capcinois, et donc les anglois, s’arrêtait seulement au climat, alors il n’y aurait pas tant d’histoires à raconter.
Ce qui singularise ce peuple, se sont surtout les luttes et les combats incessants de ces gens contre un pays difficile, une terre ingrate, dont les pouvoirs politiques furent ballottés d’Espagne, de France, en Rois de Majorque, comte de Foix et autres Administrations Occitanes, Catalane, française et j’en passe, en somme toujours étrangère à ce pays.
De siècle en siècle, les capcinois ont ainsi cultivé une indépendance farouche qui perdure encore aujourd’hui sous une autre forme.
Le Capcir atteignit le XXème avec dix communes, bien qu’il en subsiste six aujourd’hui : Les Angles, Fontrabiouse et Espousouilles, Formiguères et Villanova, Matemale, Puyvalador et Rieutort, enfin Odeillo et Réal.
Les Angles est de loin la commune la plus vaste du plateau du Capcir. Victime des sarcasmes de l’histoire, elle vécut longtemps recluse et isolée au creux du Llaret, montagne qui dominait le plateau Anglois. Dans ces longs mois d’hiver, durant de longues années les anglois écumèrent une vie essentiellement basée sur la culture agricole. Le maintien des hommes était garanti à l’époque grâce aux pasquiers et à l’élevage. La hiérarchie des ressources se bornait à ce triptyque élevage, forêt, agriculture. Le capcinois se nourrissait essentiellement des produits de la terre: pain de seigle (seule céréale qui résistait à l’altitude et au froid), les pois et les choux. Aux cultures classiques s’était ajoutée la pomme de terre définitivement adoptée. Les petites de préférence, très charnues. Car assez vite, on s’aperçut qu’elles venaient très bien avec l’altitude. Très vite aussi, la faim qui rodait sans cesse et malgré les craintes, on se dit que si elles étaient bonne pour les animaux, elles le seraient pour l’homme.
La pomme de terre - aliment de base de l’humanité – le « pain des pauvres » comme disait Louis XVI, apparue à la fin du XIXème siècle devenait de surcroît un moyen non négligeable de ressource (elle sera la plus réputée dans toutes les Pyrénées-Orientales et se vendra facilement dans toute la région).
Aujourd’hui encore, elle demeure la plus cultivée du coin. Certains enfants du village ayant compris le parti qu’il pouvait tirer de ce riche légume ont attelé à nouveau le tracteur pour la période estivale. Il n’est pas rare de trouver à chaque coin de maison l’été, des points de vente. C’est dire l’engouement pour la belle « perdiu » du Capcir !
On peut alors venir faire son choix dans ces vieilles granges désaffectées où règne une ambiance de fraîcheur mêlée à l’odeur de terre qui imprègne les pommes !
Le porc représente l’essentiel de la viande que le Capcinois consomme. Il s’octroie aussi une partie du gibier qu’il braconne et des truites qu’il pêche dans les rivières et les lacs.
Il écoule le reste dans les hôtels. Les veaux et les vaches sont vendus à la foire. L’argent récolté sert à se procurer un peu de vin, d’huile, de riz ou de sardine...
L’unité géographique évidente conféra au Capcir certaines particularités. Jusqu’au milieu du XXème siècle, il existait une unité ethnique bien spécifique, le capcinois, sujet têtu, petit, sec, souvent blond, les yeux gris, endurant, robuste, vaillant, obstiné, solide, dégourdi et suffisamment avisé pour inventer un trésor d’ingéniosité pour survivre. Même la langue y était différente. On y parlait un pseudo catalan. Par exemple, le couteau que l’on appelait en plaine, « el ganibet » se disait « el coutell » en Capcir.
Pour autant, jamais l’autonomie du Capcir ne suffisait à y créer une unité administrative réelle.
Après bien de soubresauts, l’Espagne dernier pays à détenir le Capcir, garda finalement la viguerie de Cerdagne, à l’exception de la vallée de Carol et d’une continuation de territoires qui serviraient de communication entre cette vallée et le Capcir.
Le 12 novembre 1660, par la convention de Llivia, 33 villages situés dans la dite vallée furent désignés pour assurer cette communication. Llivia, ville et non village aux yeux des Espagnols, ne fut pas cédée. C’est ainsi que naquit l’enclave espagnole.
La frontière coupa en deux le pays, mais le Capcir allait redevenir dès lors définitivement français.
Seule Formiguères demeurait de par son imposante stature, chef-lieu de territoire. Les allées et venues officielles s’opéraient à cette époque par le nord en provenance de l’Aude. Les lignes de transport joignaient naturellement Formiguères au reste du pays.
Le parcours des Angles n’eut rien d’un chemin de croix. Cloîtré dans son coin de rectangle, elle n’en acquit pas moins une force de caractère exemplaire et un sens aigu de l’indépendance. Elle dut d’abord attendre l’aube du XXème siècle pour être enfin reliée à Mont-Louis. Ce fut en 1894, il avait fallu près d’un siècle pour construire cette route ! Les bouleversements politiques du pays ayant énormément influencés la situation du Capcir, la construction de la nationale 118 se fit pressentir dès 1806. La route partit de Mont-Louis en 1825 pour s’achever de l’autre côté, dans le Donnezan, en 1885. Les Angles pourtant maintes fois demandeur, n’obtint pas la desserte de cette voie et dut attendre une décennie supplémentaire pour être enfin reliée via le col de la Quillana. Ce sera la seule voie de communication qui relie encore aujourd’hui les Angles au reste des P.O. Un grand projet de chemin de fer vite avorté, aurait pu sincèrement modifier le cours de l’histoire, mais il ne fut que grande désillusion. Les guerres n’y furent pas étrangères. Le projet tomba définitivement à l’eau en 1927. Rien ne se fit. Les Angles et le Capcir pouvaient alors se mourir tout doucement…
Mais il en fallait beaucoup plus pour faire tomber les Angles. Tant bien même les murs survivraient, encore fallait-il que ses habitants eux, survivent !
En 1836, les Angles comptait 730 habitants. Le maximum enregistré jusqu’alors. Tandis que ses voisins démarraient un certain exode interne, Réal avec Odello, Fontrabiosa avec Esposolla, Matemala également, opéraient des mouvements de population à destination de Formiguères, les Angles stabilisait sa population à une moyenne de 500 habitants après avoir perdu près de 150 habitants sur seulement 10 ans.
En 1936, la commune comptait 517 habitants, elle n’en comptait plus que 341 en 1946 : l’heure du déclin avait sonné…